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La cuisson du pain est aussi privilège féodal et se fait au four banal. Philippe Auguste autorise les boulangers à construire un four chez eux moyennant redevance ; Philippe le Bel étend cette tolérance aux bourgeois. L’unité du pain est la denrée : le pain d’un denier. Il y aussi la mie qui est le pain d’une obole et le doublon. Les pains de rebut sont vendus le dimanche sur le parvis Notre-Dame, mais les pains ratés – rongés par les rats- ne peuvent être mis en vente.
Les noms des pains sont innombrables selon les localités ou l’usage auquel ils sont destinés : pain curial, pain d’escuyer, de servant, ou pain de chapitre pour les chanoines de Notre-Dame. Celui qui est fait de fleur de farine est le pain de primor ou choine. Le pain de ménage est le pain bourgeois, le pain reboulet est fait de farine seconde et le pain d’amendement est de deuxième qualité. Le pain bis de froment et de seigle est le pain faitis ou pain de brode ; à partir du XVI ème siècle on fait des pains mollets pétris avec du beurre et du lait. On fait aussi des pains bis-cuit, de longue conservation, en usage dans certains couvents ( notamment Clairvaux), ainsi que dans la marine et l’armée.
Le boulanger au XV ème siècle- La cueillette de la vigne au XVème siècle
L’usage du pain bénit, hérité des Romains est adopté par l’Église catholique. Le pain de calandre est pétri la veille de Noël ; on fait des croix sur sa croute et on en conserve un morceau toute l’année à titre de porte-bonheur. Le pain calendaire est offert au clergé lors de certaines fêtes.
Les boulangers font aussi des pâtés et certaines pâtisseries : les flamiches (galette de froment) , des fouaces ( gâteaux de pâte ferme, non levée, pochée dans l’eau bouillante, puis cuits au four), puis les pâtisseries forment une corporation spéciale qui obtient en 1440 le privilège exclusif de fabriquer des pâtés de viande, de poisson ou de fromage. Les principaux gâteaux vendus au moyen-âge sont en plus des flamiches, des fouaces et des échaudés, les ratons, les tartes, les pains ferrés, les gâteaux à fève, qu’on consomme même en dehors du temps de l’épiphanie, les flaons (flancs, divers beignets dont les beignets venteux ( pets de nonnes), des gimblettes et des nieules.
Repas de chasse Bergers et paysanne au XVème siècle
Plus tard encore, au XVIII ème siècle, le pâtissier Favard invente les croquigneulles, en souvenir des nieules.
Les talmouses ou cassemuseaux sont garnis de fromage blanc, dorés au jaune d’œuf et saupoudrées de sucre.
Les darioles ou tartelettes riolées sont également au fromage ou à la crème.
Les gâteaux feuilletés sont mentionnés dès 1311 dans une charte de Robert, évêque d’Amiens : il y a aussi les biscuits qu’il ne faut pas confondre avec le pain bis-cuit et les pains d’épices aux formes et aux noms souvent obscènes. Les fabricants d’oublies sont des oblayers qui fabriquent aussi des hosties : pain à chanter la messe.
Leur valet doit cuire au moins mille oublies dans la journée sous peine de renvoi ; les apprentis sillonnent la ville en proposant » les oublies, des gaufres, des nieules, des roinsolles » qui se jouent aux dés. Plus tard, on les enfermera dans un boite cylindrique munie d’un tourniquet.
Nous avons vu comment l’antiquité ne connaissait de saveur sucrée que le miel. Les Grecs avaient une notion approximative de la canne à sucre depuis les expéditions d’Alexandre. On l’appelait » miel de roseau » ou « sel indien » et il était fort rare.
Pendant les croisades, sur le territoire de Tripoli, où il avait été importé par les Arabes, les croisés le goûtent pour la première fois en 1099. Albert d’Aix relate ainsi cette découverte:
« Les champs étaient couverts de roseaux miellés qu’on appelle sucre. cette espèce d’herbe est cultivée avec beaucoup de soins; quand elle et mûre, les indigènes la broient dans un mortier, en passant le sucre qu’ils recueillent dans des vases, et le laissent coaguler jusqu’à la consistance de neige ou de sel blanc ; les croisés s’en firent une bouillie en le mêlant avec du pain ou en le délayant dans de l’eau et le trouvèrent plus agréable et plus salutaire que les rayons de miel ; lors des sièges d’Albanie, des Archas, et des Maarha, l’armée fut sustentée par les roseaux miellées ».
Dès le XIII ème siècle, le commerce du sucre devient très important chez les apothicaires. On en fait des confitures, des nougats, des dragées, toutes les »épices de bouche » qui sont appréciées, mais demeurent chères, donc interdites aux gens de modeste condition.
Le sel provient de la côte atlantique et de la Manche ainsi que des salines de la Franche-Comté ; il est vendu en gros par les marchands sauniers, puis au détail par les regrattiers. Son commerce est si florissant qu’au XIV ème siècle, on le frappe d’un impôt, la gabelle qui, bien que très impopulaire, persistera jusqu’à la révolution. En 1340, Philipp VI de Valois fait de sa vente un monopole d’État et crée des greniers à sel, administrés par des officiers gabeliers.
Toutes ces corporations naissent et s’épanouissent en milieu urbain ; la circulation d’argent entraîne l’abondance et les hauts murs des enceintes garantissent la sécurité. Il n’en va pas de même dans les campagnes où les paysans sont soumis aux variations saisonnière, si bien que les régions se nourrissent souvent en circuit fermé, les régions pauvres, de choux, de châtaignes, les riches de froment, de lait, de beurre. Partout le paysan élève des cochons et les particularismes locaux donnent naissance à des modes de cuisson ou d’accommodements qui deviendront les spécialités régionales. Tantôt on cuit le porc et on le conserve dans la graisse comme dans le sud-ouest ; c’est le confit. Ailleurs, il est conservé au saloir. Le jambon à cette époque se nomme bacon ; le mot à traversé la Manche et nous est revenu anglicisé. La chair du porc hachée devient, suivant le mode de préparation, andouilles et mortadelles, saucissons et saucisses d’une infinie variété. depuis Charlemagne, le fromage est partout gouté en France et chaque région a sa spécialité. Les plus appréciés sont ceux de Brie et d’Auvergne. Les gourmets importent des fromages de Gruyère et de Hollande.
Chez le vilain, le fond de la nourriture est le même que dans l’Antiquité : c’est la bouillie de seigle ou d’orge plus souvent que celle de blé. le potager fournit les légumes; la viande est rare; les jardins contiennent des ruches. Les grands travaux saisonniers se font collectivement : pendant la moisson, la fenaison, les vendanges, chacun va aider son voisin. De temps en temps, les récoltes sont mauvaises, ou la guerre sévit ; en 1345 une grande famine éprouve la France et la peste noire de 1347 décime la population ; mais sans cesse, opiniâtre et courageux, le paysan reconstruit sa chaumière, défriche, ensemence les champs et nourrit sa famille, paye les redevances au seigneur et les banalités pour l’usage obligatoire du moulin, du four, et du pressoir ; la dîme au clergé et après la guerre de cent ans la taille au roi et la gabelle.
Le paysan est sans cesse obsédé par la crainte de manquer du nécessaire et par le souci de faire suffisamment de provisions pour les longs mois d’hiver. Nous avons vu les différents procédés de conservation de la viande salée ou confite, des légumes secs, des poissons séchés, salés ou saurits, des fruits en confiture, gelées, ou sous forme » d’épices de bouche », enfin des fruits secs.
Pour la première fois depuis l’époque gallo-romaine et mis à part les temps de calamités, les Français en général mangent en suffisance et organisent leurs provisions.
Ils n’auront de cesse de parfaire leur nourriture en quantité et en variété et vont appliquer leur génie à dégager la cuisine française de la tradition gallo-romaine.
( à suivre…)