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Viennent ensuite le lait de vache, de chèvre ; les fromages au poivre, au miel et au vin ; le miel liquide ou en rayons ; les compotes de mûres blanches ou jaunes ; le vin de mûres, l’hydromel, la moutarde, les herbes pilées et les herbes au vinaigre et au poivre : les condiments, les flans, les gâteaux, les œufs, les légumes : fèves entières ou en purée, pois, lentilles entières ou en purée, les vesces, les bouillies de millet, les racines, les choux différentes sortes, les poireaux, crus et cuits, les champignons bouillis, les melons, les courges, les laitues, les salades, les diverses herbes. Parmi les fruits : pommes, olives, citrons, figues, dattes, raisins, grenades, poire à cidre, châtaignes, pêches, prunes, cerises, griottes, noisettes et noix. Le service des poissons comporte vin jeune et vieux, moût, vin miellé, vin épicé, vin de sauge, cidre, vin de mûres, vin cuit, hypocras, hydromel pur et épicé, bière et … enfin l’eau. Toujours d’après la chronique de St Gall, si l’empereur manifeste sa prédilection pour les gros rôtis, il a aussi un faible pour le fromage et raconte à ce propos : « Au cours d’un de ses voyages, l’empereur étant arrivé à l’improviste, un jour maigre chez un pauvre évêque, dut se contenter d’un peu de pain et fromage. ce fromage ayant des tâches, dont il ignorait la nature, il prit soin de les enlever avec la pointe de son couteau ; son hôte se permit de lui faire respectueusement remarquer qu’il enlevait ce qu’il y avait de meilleur. Charlemagne écouta cet avis, fut convaincu au point qu’il pria son amphitryon de lui renvoyer chaque année deux caisses de ce fromage ».
Le chroniqueur n’indique pas dans quelle localité se passa ce dialogue. Il n’est pas impossible que Charlemagne fût l’un des premiers dégustateurs de Roquefort. Bien entendu, les excès décrits par St Fortunat sont tout à fait exceptionnels. Le catalogue du moine Eckehard est une nomenclature de tout ce qui se mangeait, mais non point un menu où l’on dégustait tous les plats cités. Personne ne se goinfre ainsi habituellement dans un pays appauvri où l’agriculture se refait doucement, mais où l’outillage agricole perfectionné des Gaulois a presque disparu. L’insécurité règne tant dans les forêts autrefois nourricières, devenues repaires de bandits, que sur les merveilleuses routes romaines, maintenant abandonnées, qui se détériorent. Ainsi les marchandises sont rares et circulent peu : la monnaie devient introuvable et fait place à l’ancien système du troc, comme toujours en temps de pénurie. Les pièces d’argenterie et d’orfèvrerie constituent des valeurs refuges, ce qui explique l’avidité des seigneurs et parfois des évêques ou des supérieurs de couvent à s’en procurer. Il est vrai que le plus souvent ces belles pièces sont ensuite envoyées à la fonte pour aider les victimes des calamités. Les paysans, pour se procurer les denrées de première nécessité, les monastères obtiennent l’autorisation d’organiser des foires. Ainsi ? Dagobert permet à l’Abbaye de St Denis de tenir une foire du 11 juin au 26 ; c’est la foire de l’Indict (Indictum : proclamation) devenue dans le langage courant la fameuse Foire du Lendit.