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Anatole France
La fabuleuse histoire de la cuisine française (suite)
Alexandre Dumas est très fier de ses talents culinaires. Mais il n’est pas toujours apprécié par ses contemporains. Aurélien Scholl, qui le considère comme le premier des conteurs, le déclare pourtant le dernier des gargotiers.
Alexandre Dumas
En 1869, Dumas commence à écrire son « Grand Dictionnaire de Cuisine » ; il remet son manuscrit à son éditeur Alphonse Lemerrre en mars 1870. Mais la guerre arrête la fabrication de l’ouvrage qui ne paraît qu’en 1873. Dumas est mort en 1870 et c’est Vuillemot qui reçoit les épreuves. Denis Joseph Vuillemot est un ami d’enfance de Dumas, petit-fils d’un maître d’hôtel de Madame de Lescure, cousine de Louis XVI à Bressuire ; il entre à 15 ans chez Very, au Palais-Royal, ensuite il passe à la Maison Royale, puis travaille avec Carême.En 1837 il reprend l’établissement de son père, l’hôtel de la Bannière à Crépy-en-Valois, puis en 1842 dirige l’hôtel de la Cloche à Compiègne, en association avec M.Molière. C’est là que Dumas le retrouve.
« Harassé de fatigue et mourant de faim, j’interpellai le chef de l’hôtel de la Cloche en ces termes :
« Holà ! n’y a-t-il pas à nous servir des roues de cabriolet à l’oseilles et des manches de couperet à la Sainte-Menehould ? »
Vuillemot, qui n’était pas en retard de réplique et qui par son guichet venait de le reconnaître, dit :
« Monsieur, il ne nous reste plus que des côtelettes de tigre et du serpent à la Tartare. »
Plus tard, Vuillemot s’installe à Paris au restaurant de France, place le la Madeleine ; enfin, il termine ses jours à Saint-Cloud à l’hôtel de la Tête Noire. Il apporte à Dumas son aide pour son fameux livre de cuisine et Dumas ne manque jamais de faire de la réclame à son collaborateur et ami dans ses « propos de cuisine « .
Ce Grand Dictionnaire de Cuisine n’aura pas autant de succès que Dumas l’espérait. Quelques années plus tard l’éditeur Lemerre en tire un petit Dictionnaire de Cuisine, de format réduit ; il fait faire ce travail par son apprenti le jeune Thibaud qui à cette époque n’est pas encore Anatole France…
Une remarque vaut d’être notée : Dumas rejette avec horreur le service à la Russe qui depuis c’est imposé unanimement et qui, selon lui consiste » à vous montrer le plat que vous allez manger, et par le plat j’entends ce qu’il contient, puis à le faire découper loin de la table par le domestique, et à vous faire glisser par le susdit domestique sur votre assiette non pas le morceau qu’il vous plairait de manger, mais le morceau qu’il lui plait de vous servir. Je sais que, sur un dîner de quatre cent francs, cette manière de servir fait cent francs d’économie, mais on ne donne pas à dîner pour faire des économies.
C’est pourtant cette manière de servir que nous voyons dans les meilleures maisons. Elle est bien éloignée, il est vrai, de la tradition des Écuyers-tranchants.
Source : La fabuleuse histoire de la cuisine Française d’Henriette Parienté et Geneviève de Ternant aux Editions O.D.I.L.